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Le pouvoir d'achat



Aujourd’hui notre pouvoir d’achat est en baisse, nos dirigeants veulent agir sur ce pouvoir d’achat mais le pouvoir d’achat ne se décide pas, il n’est que la conséquence d’un fonctionnement économique complexe.


Parmi les solutions proposées à ce jour :

  • Augmenter le SMIC, cela pénalise toute la production des entreprises, les marchandises réalisés coûteront encore plus cher, seul les produits importés y gagneront car ils en deviennent encore plus concurrentiels.

  • Diminuer les charges sociales, cela revient à pénalise tous les services sociaux, et ce rabais devra être récupérer par des taxes ou des prélèvements, sinon c’est la qualité de vie, des soins et des retraites qui s’en trouveront pénalisés. Cela permet peut-être une baisse des prix mais l’élévation des taxes et prélèvement compenseront cette baisse en réduisant les salaires.

  • Diminuer les taxes TIPP et TVA revient à réduire les dépenses de l’état, c’est à dire réduire les salaires ou le nombre des fonctionnaires et les investissements. Cela freine l’économie elle même. Si l’effet immédiat se traduit par une baisse des prix, l’effet secondaire se traduit aussi par une baisse des revenus globaux de la population à moyen terme. Le pouvoir d’achat connaît une embellie passagère mais le chômage suit aussitôt et la production globale diminue ce qui favorise encore les importations.


Comment agir sur le pouvoir d’achat ?

D’abord le comprendre :

Il résulte du rapport entre la quantité de marchandise disponible et des moyens de paiement des acheteurs.

S’il y a plus la marchandise que de moyens d’achat les prix auront tendance à baisser, inversement si la demande est forte les prix montent.

Mais pour cela il faut d’abord qu’il y ait de la marchandise disponible :
Les sources de marchandises sont soit le travail réalisé dans le pays, soit des importations.

Un pays qui produit beaucoup, se retrouvera avec beaucoup de marchandises, et si sa monnaie est forte il pourra aussi acquérir beaucoup de marchandises à l’étranger. De plus cette même monnaie surévaluée peut freiner ses exportations et remplir les étals locaux quand vendre à l’exportation devient moins rentable à cause d’un prix élevé, le vente se fait donc sur place.

Ces deux effets cumulés devraient avoir tendance à générer un surcroît local de marchandise quand un pays produit beaucoup et possède une monnaie forte. Le pouvoir d’achat devient très correct.

Mais si le pays produit très peu par lui-même, il doit tout acheter à l’extérieur, résultat sa monnaie quitte le pays, surtout si elle est forte, et devient une source d’inflation. Chaque achat réduit le train de vie du pays tout entier. Une dynamique des échanges se met en place qui pompe littéralement toutes les liquidités du pays peu productif. Des habitudes de consommations de produits exotiques remplacent les consommations locales. Le pouvoir d’achat s’écroule.

S’il n’est donc pas suffisant d’avoir une bonne monnaie, il est indispensable d’avoir avant tout une bonne production locale de marchandises ou de services.


La mesure du pouvoir d'achat

Quand le statisticien estime le pouvoir d'achat d'un groupe, il peut passer sous silence sa répartition. Ainsi si l'un achête 100 et l'autre 0 cela ne donne pas un pouvoir d'achat à 50. Si la marchandise existe et que la monnaie est disponible il existe donc une autre donnée essentielle pour le pouvoir d’achat : La répartition des richesses.

Ainsi si une partie importante de la population possède l’essentiel des moyens financiers, l’autre partie en est démunie. Le commerce local même bien achalandé ne trouve plus assez de clients solvables pour écouler sa production. De plus celui qui possède « trop » de monnaie, ne consommera pourtant pas plus que ses besoins, il se contentera de placer ses fonds excédentaires en bourse internationale, au pire il gaspillera ses excès en produits de luxe ou en achats à l’étranger ce qui pénalise le pays d’origine.

Ces produits de luxe consomment une grande quantité d’heures de travail au profit d’un très petit nombre de bénéficiaire, si financièrement parlant cela peut sembler « rentable », socialement parlant cela signifie que beaucoup de temps de travail est consacré en vain sur des créneaux d’une utilité sociale sans intérêt pour la plus grande partie de la population. Pour les ouvriers de ce secteur, s’ils en reçoivent les salaires, ils ne bénéficient pas pour autant des produits réalisés, à terme ils auront de l’argent mais trouveront peu des produits qui leurs sont nécessaire à acheter. Leur pouvoir d’achat s’en trouve réduit.

Le pouvoir d’achat résulte donc surtout de la répartition des moyens d’achat. Il n’est pas normal que l’échelle des salaires dépasse l’échelle des compétences. C’est ce décalage qui prive de pouvoir d’achat le plus grand nombre des salariés pourtant producteurs de marchandise. Dans l’échange ils n’ont plus moyen d’acquérir l’équivalent de leur production, si ces moyens sont injustement répartis parmi les différents acteurs.

Ce n’est pas sur le Smig la TVA ou les charges sociales qu’il faut agir pour améliorer le pouvoir d’achat, c’est sur la production de marchandises locales (Pour améliorer la production une solution vous est déjà proposée.) et surtout sur la répartition des revenus de cette production, c’est à dire l’échelle des salaires.


Loi proposée :

Tout chef ou cadre d’entreprise ne doit pas gagner plus qu’un multiple défini du plus faible des salaires de son entreprise. Ce coefficient estimé à partir des pratiques actuelles doit être fixé par la loi et progressivement ramené à une valeur plus respectueuse du travail de chacun. La pratique des « notes de frais » ne doit couvrir que des besoins réels et nécessaires à l’entreprise elle-même et pas à ses seuls dirigeants.

Page écrite le 16-02-2008

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Intervenant d'un chomeur de 60ans, actif 15/02/2008

un article à paraitre dans revue nationale sur le sujet: Titanic ou métamorphose ? Les deux peuples de France

Alors que nous n'avons jamais été aussi performants pour produire des richesses utiles et inutiles, pourquoi le constat des inégalités criantes conjugué au sentiment d'effondrement, de peur, d'impuissance du politique et des élites, de ruptures à tous les niveaux, n'a t-il jamais été aussi fort ? Notre avenir ressemble t-il à celui d'un Titanic s'échouant sur les icebergs d'une crise sociale, écologique, monétaire sans précédent ?

Ou cette crise de confiance qui dans sa dimension individuelle et collective prend l'aspect d'une dépression émotionnelle, est-elle l'étape nécessaire à la difficile métamorphose d'une chenille en papillon ?

Le contexte :

Titanic ou chenille, ce dont il s'agit c'est la mutation du modèle de société de type occidental fondé sur le marché comme forme exclusive d'échange entre les hommes. Un modèle qui en trois siècles, s'est étendu comme une vague déferlante au monde entier. Sera t-il submergé par la vague même à laquelle il a donné naissance ? « Profit, accumulation » seront-ils encore les deux mots clés de la société de nos petits enfants ?

Historiquement les formes classiques de l'accumulation des richesses monétaires du Système Capitaliste Libéral Occidental ont eu deux moteurs :

  • L'exploitation des gisements de main d'ouvre « bon marché » et de matières premières « gratuites? » périphériques. La Colonisation relayée après 1947 par les délocalisation au nom du « Développement » s'inscrivent dans ce processus. L'uniformisation des repères culturels nécessaire à l'extension du règne de la marchandise, en a été la condition ;


  • La guerre qui même partielle (on dit maintenant chirurgicale) permet le retour de l'accumulation. ( Ne dit-on pas au café du commerce « une bonne guerre et çà repart ! » ). Ce fut la solution de la crise de 1929 qui sur de nombreux aspects (emplois, chute du pouvoir d'achat, inégalités, dettes, spéculation et finance..), ressemble à celle d'aujourd'hui.


Mais depuis les années 1970 un troisième moteur d'accumulation de profit se met en place complémentairement au deux premiers. Il a pour nom : « révolution technologique ».

De portée encore plus considérable que la révolution technologique du XIX eme siècle qui a porté l'ère industrielle, cette révolution technologique en cours se traduit par des nouveaux matériaux, de nouvelles énergies, un nouveau rapport au temps (instantané) et à l'espace avec Internet, un nouveau rapport au vivant avec les biotechnologies et nano technologies.

Au premier regard, pour notre société du tout marché, où « ce qui ne se compte pas-en argent- ne compte pas ! », cette révolution technologique a le même effet qu'une guerre pour restaurer des taux de profit. Les outils de production des adversaires sont rendus obsolètes et leurs travailleurs deviennent des morts économiques. D'où le nom que lui donnent certains économistes de « destruction créatrice ».

Mais bien plus encore que d'être des objets ou outils que nous possédons et qui en retour nous possèdent, ces produits (automates, ordinateurs..) de la révolution technologique, transforment en profondeur nos manières de produire ( avec de moins en moins de travail humain), de consommer et de vivre au quotidien.

Cette destruction créatrice va t-elle changer nos sociétés humaines dans ses fondements en mettant les mots « partage, responsabilité et réciprocité » au cour d'une nouvelle manière de vivre ensemble ? Ou au contraire cette destruction créatrice va t-elle mettre sa puissance au service du modèle du tout économique qui fait du profit sa seule finalité ?

Pour apprécier de manière prospective, avec la métaphore du Titanic ou de la Métamorphose, les évolutions possible de notre société de marché globalisé à l'ensemble de la planète, avec l'entrée de la Chine et de l'Inde en « religion de marché », observons à notre échelle française (avant de l'extrapoler) les premiers effets sur trente ans de la « destruction créatrice » de la révolution technologique et la manière qu'ont nos institutions de s'y adapter ;


Les deux peuples de France : les travailleurs et les exclus du travail

Dans la théorie des sentiments moraux, Adam Smith théoricien de l'économie libérale de marché (1759) exprime que « la recherche de reconnaissance est l'un des plus puissants mobiles de la vie en société ». Mais que devient ce mobile dans une société qui a lié exclusivement la reconnaissance à un travail sous forme d'emploi, lui-même condition de l'obtention d'un revenu monétaire dans une société de plus en plus urbaine, donc fragile dans sa survie ?

Selon l'hebdomadaire financier belge « Tendances », en 1975, la part des revenus du travail comptait pour quelque 70% du PIB (produit intérieur brut) de l'Union européenne à 15. Trente ans plus tard, il n'atteint pas 58 % ( Marc Mangenot-Fondation Copernic). Que s'est-il passé ?

Dans la relation complémentaire Travail-Capital qui produisait la richesse marchande de la société de marché de 1945 à 1975 ( appelé la période fordiste des trente glorieuses), l'équilibre s'est rompu au profit du Capital dans les trente années suivantes (1975-2005).

Sans le voir nous avons changé de contrat social, ces trente dernières années où les revenus du capital ont augmenté en France de 22% et ceux du travail ont baissé de 17 % ( Le Monde, René Passet). Dans le couple Marché -Etat qui a permis la reconstruction après la dernière guerre mondiale et l'enrichissement collectif des Trente glorieuses (1945-1975), l'équilibre s'est rompu entre les deux au profit du marché devenu sans frontières.

Transféré au domaine des valeurs « Liberté -Egalité » en tête de notre constitution de 1789, qui a marqué le monde entier, c'était comme si la valeur Liberté avait irréversiblement pris le pouvoir sur la valeur Egalité, après 1975 ! Pour le philosophe Hegel la monnaie « est de la liberté frappée » et pour beaucoup d'entre nous avoir de l'argent est gage de liberté.

Comment comprendre que les partis politiques de gauche, normalement sensibles au rôle régulateur de l'Etat, n'aient pas pu ou su voir dans les années 1980, cette rupture du contrat social inscrit dans la Constitution ? Comment ont-ils pu à ce point adhérer au consensus de Washington formulé par le président Reagan et madame Thatcher et résumé par la célèbre formule TINA (There Is No Alternative) : il n'y a pas d'alternative à la société de marché ?

Les années 1975, début de la révolution technologique évoquée plus haut, marquent le début d'un transfert massif d'emploi des activités industrielles qui se robotisent (ou se délocalisent ) vers les emplois de la société de service où se logent maintenant 80 % des emplois. La montée de la grande distribution dans les périphéries des villes, au détriment des petits commerces de proximité, date aussi de ces années là. Par la nature même de cette société de service où s'échangent de l'information, des relations, des images, du temps.plus que des objets de consommation de masse, la croissance passe des 4,8% (moyenne des trente glorieuses) à 2% (moyenne des trente années suivantes). Quoi de plus normal !

Jamais il n'aurait été plus opportun de débattre à nouveau du contrat social en mettant à l'ordre du jour l'affectation équilibrée des richesses quand la productivité du travail (engendrée par la révolution technologique acceptée par tous ) devenait supérieure à la croissance ! « Quelle nouvelle répartition entre capital, travail et baisse des prix - de ce surplus de richesse collectivement et interactivement créée ? » aurait pu être au centre des débats sur la « res publiqua » ou le vivre ensemble.

Le choix tacite maintenant paraît évident, confirmé par tous les chiffres officiels : les milliards d'heures travaillées libérés par la révolution technologique au lieu de se transformer en « temps choisi » et qualité de vie pour tous, s'est reporté en temps libre « subi et non choisi » pour les exclus de l'emploi. Ainsi est né le deuxième peuple de France, cet ensemble hétérogène des « sans voix » parce que non représenté par les syndicats, dans notre pays qui produit deux fois plus de marchandises avec un tiers d'heures travaillées en moins. Ces héritiers du temps libéré, mais le plus souvent subi car sans revenu ni reconnaissance sociale, ont pour nom chômeurs ( dont seuls la moitié sont indemnisés), travailleurs précaires à temps partiel subi, rmistes etc .soit douze millions de Français dont les revenus monétaires ne dépassent pas les 820? par mois (seuil de pauvreté) nous dit l'INSEE.

Déjà dans les années 1980, François Mitterrand disait « sur la question du chômage, nous n'avons pas fait mieux que les autres ». Jacky Fayolle ancien directeur de l'IRES (Institut de recherche économique et sociale ) évalue en gros de 120 milliards à 170 milliards d'euros ce transfert des revenus du travail (les salariés) vers le Capital (les actionnaires) depuis 1983 ! ( le monde diplomatique janvier 2008). Comment les exclus du travail peuvent-ils comprendre alors le discours politique actuel qui, avec la complicité des médias, se focalise sur le déficit de la sécurité sociale (12 milliards) et sur les retraites ( 5 milliards) !

Quant au premier peuple de France, qui dispose encore d'un emploi, il s'est renouvelé et enrichi depuis 1980 de 6,5 millions de femmes supplémentaires, qui sont rentrées par nécessité ou désir de reconnaissance, dans le monde des salariés d'une société de service mieux adaptée à elles, et de deux millions d'hommes supplémentaires rentrés sur le marché du travail en raison de la croissance démographique.

Ce premier peuple de France « accroché désespérément à son emploi » de peur de le perdre (c'est l'actionnaire qui décide !) et qui pose la question du pouvoir d'achat, est -il plus heureux pour autant ? Il subit aussi cette non réévaluation du contrat social (Capital-travail), imposé par la « destruction créatrice », pour nous libérer du travail dont nos ancêtres auraient rêvé ? Sûrement que beaucoup d'entre eux auraient préféré plus de temps libre, si leur revenu n'avait pas été aussi érodé par la victoire des revenus du capital sur les revenus du travail !

J'en ai pour preuve le succès de notre expérimentation citoyenne du temps choisi mené de 1992 à 1994 en Rhône Alpes qui proposait « un chèque de temps choisi de 3500 francs net /mois » (simple calcul de transfert de charge d'un chômeur à mi-temps en moins) à toute personne qui négociait avec son employeur un passage à mi-temps pour s'adonner à un projet de temps choisi à finalité associative sociale, culturelle ou écologique dans son environnement de proximité. Mais la gauche française n'en a pas voulu préférant avec Martine Aubry les 35 heures pour tous, contre de la flexibilité, solution plus traumatisante pour les petites entreprises que le temps choisi ! Les femmes italiennes à travers leurs représentantes politiques ont repris avec succès notre projet du cheque de temps choisi (encouragé par l'Europe) que la vague Berlusconi a vite remis au panier.

Voilà donc le « premier peuple de France » de s'interroger pour nombre d'entre eux sur leur stratégie de « perdre sa vie à vouloir la gagner » en voyant leur ascension sociale remise en cause et leur pouvoir d'achat s'éroder, avec en prime le doublement des loyers ! Pourtant ce sont des héros laborieux du travail puisque même les statistiques américaines reconnaissent à la France la palme d'or des gains de productivité au travail, pour les plus grands bénéfices des actionnaires du Capital ! Mais il n'y a pas de gloire sans prix à payer ! Ces dix dernières années les conditions de vie au travail se sont à ce point dégradées en France qu'une femme salariée sur trois et un homme salarié sur cinq sont devenus malades du travail (consommation record d'anxiolytiques) nous déclare le ministère de la santé et l'IFSS (institut français du stress et de la santé) ! Le mode de vie dominant « métro- boulot- dodo » de ce premier peuple laborieux de France dont 17% sont au SMIC (autre record européen), choyé par le Politique et les médias, ne laisse guerre de temps autre (surtout pour les femmes qui cumulent le travail domestique invisible et l'emploi) que la télévision pour renouveler leur désir mimétique de consommation à travers des spots publicitaires alternant foot ball et star mania, et réfléchir ainsi avec sens critique aux évolutions de la société. Il n'est pas étonnant qu'ils se laissent séduire par la proposition récente « de travailler plus pour gagner plus » sans s'interroger sur les fondements du contrat social Capital-Travail dont ils pensent bénéficier en devenant des petits actionnaires , mais qui produit sous leur yeux la société duale depuis les années 1980 ! Cette dualisation engendre mal-être, tensions, délinquance, solitude, maladies, suicides, violence ? Qu'importe, elle crée les emplois qui lui sont liés ! A chacun sa solution individuelle : résidences sécurisées, police de proximité, école que l'on peut choisir, « chèques emplois services » pour embaucher des domestiques en payant moins d'impôts et en travaillant plus etc.! Et l'Etat dans tout cela ? Il se retire pour laisser les associations bénévoles colmater les brèches au nom du nouveau concept d'économie solidaire. Ne nous y trompons pas, l'assistance de l'Etat (minima sociaux) à ceux qui n'ont pas de travail ne fait que diminuer en pourcentage dans le PIB. Par exemple le RMI qui représentait 2,3 heures de SMIC horaire /jour à sa création en 1989, ne représente plus que 1,8 heures de Smig horaire /jour aujourd'hui (-22%).


Le rôle historique du Politique : la régulation de la violence

Dans le contexte historique d'une mutation de société vers une société urbaine à dominante de services ( où les emplois féminins deviennent majoritaires depuis peu), où le débat politique se réduit au débat technique et fiscal de gestion des affaires les plus sensibles (celles qui ont accès aux grands médias de moins en moins indépendants), que reste t-il au Politique comme marge de manouvre ? Celle, le plus souvent de déshabiller fiscalement Pierre pour habiller Paul, dans un consensus généralisé ( à droite comme à gauche) de recul nécessaire de l'Etat ? Qui n'a pas entendu « les caisses de l'Etat sont vides » , « l'Etat est endetté » pour plaider le recul de l'Etat, mais qui s'interroge sur le contenu de cette dette ?


Que doit comprendre le premier peuple laborieux de France ?

De 1980 à 2003 les dépenses de l'Etat sont restées stables par rapport au PIB (22,8% en 2003 contre 23% en 2003), mais les recettes ont baissé : 18,8% du PIB en 2003, alors qu'elles représentaient 22,3% du PIB en 1980 ! Contrairement à ce qu'on pense la dette de l'Etat ne s'alourdit pas en raison de l'accroissement des dépenses, mais par l'effet cumulé de l'abaissement des recettes. La recherche d'économie d'impôt dans les grandes entreprises n'est-elle pas devenu un art aussi recherché que la quête de profit ? Mais l'abaissement des recettes, c'est aussi et surtout l'effet « boule de neige » de l'intérêt ! ( Michel Husson 2006 administrateur de l'INSEE et chercheur à l'IRES, lettre d'avril 2006 « dette publique, rente privée ») . Les intérêts de remboursement annuel de la dette de l'Etat approchent maintenant le montant de l'impôt sur le revenu ( soit 40,8 milliards d'euros sur les 57,5 milliards d'impôts sur le revenu). Le premier peuple de France paye donc par ses impôts sur le revenu une charge (l'intérêt) que le banquier prélève sur notre richesse, que l'Etat n'aurait pas eu à payer s'il n'avait pas abandonné son pouvoir souverain de créer de la monnaie crédit. (décision de 1983 pour la France et de 1993 pour l'Europe ) Les rois de France qui ont construit des cathédrales grâce à leur pouvoir de créer de la monnaie, en auraient le souffle coupé ! Pire, c'est 650 milliards d'euros d'intérêts cumulés que le premier peuple de France a payé par son labeur aux banques depuis 1980 ! En éclairant cet exorbitant privilège concédé aux banques de créer à partir de rien des titres de créance pour prélever des intérêts, opérant ainsi un formidable transfert de richesse qui échappe bien souvent à l'impôt, on comprend l'expression célèbre de Henri Ford : « Il est une chance que les gens de la Nation ne comprennent pas notre système bancaire et monétaire parce que si tel était le cas, je crois qu'il y aurait une révolution avant demain matin ! » . Maurice Allais (prix Nobel des Sciences économiques en 1988) ne disait pas autre chose quand il écrivait « dans son essence, la création de monnaie ex nihilo actuelle, par le système bancaire, est identique à la création de monnaie par des faux monnayeurs, la seule différence est que ceux qui en profitent sont différents ».

Cette question de la création de la monnaie (depuis la déconnexion de la monnaie avec la garantie or par R.Nixon le 15 Aout1971) est le point aveugle de tous les débats de transfert massif des revenus du travail vers les revenus du capital que nous avons évoqué précédemment. Alors que la monnaie en circulation ( masse monétaire) a été multipliée par 27 en France depuis 1960 ( de 14 milliards à 378 milliards d'euros ), le premier peuple de France se sent-il 27 fois plus riche en pouvoir d'achat ? En l'absence de ce débat de fond (tabou ?) qui occulte les conséquences de la victoire des revenus du Capital sur le travail au profit des plus riches, on peut imaginer un premier scénario de régulation de la violence pour la fonction politique :

  • flatter le premier peuple laborieux de France pour de nouveaux sacrifices au nom de la croissance ( flexibilité, travailler plus pour gagner plus, maintien des salaires mais accroissement des cotisations sociales (CSG) et taxes de toutes sortes qui ne tarderont pas tels des dépassements de quotas sur l'énergie fossile, sur les émissions de CO2 etc). Le vieux mythe du salut par le sacrifice s'appuie toujours sur des fondements culturels profonds dans notre société judéo chrétienne !

  • culpabiliser et promettre au deuxième peuple de France le retour au plein emploi par la croissance retrouvée dans la compétition internationale. Le discours sur le chômage se réduirait alors au discours d'un chômage de friction offre /demande que l'effort de formation reconversion permettrait de résorber. Faisant partie des 40% des créateurs d'entreprises qui n'ont trouvé que la création d'entreprise comme solution à leur situation de demandeur d'emploi pour se rendre utile, je mesure tout autant les limites du discours officiel qui réduit le chômage à un simple chômage de friction offre/demande sans s'interroger sur la vrai nature d'une société à dominante d'information et de services.


Ce discours illusionniste du politique relayé par les médias ne convainc plus personne. Alors que 90% des maux de notre société trouvent leur source dans la perte de reconnaissance sociale ( le regard des autres ) du au chômage, pour ne pas parler de la perte de revenu dont l'ampleur commence à peser en « manque à gagner » pour les entreprises ( insolvabilité), un simple calcul de certificat d'étude que chacun peut faire permet de s'en convaincre. Si 777 000 emplois ont été créés en France de 1990 à 2000 avec 1,8% de croissance moyenne par an, combien faut-il de croissance de PIB pour absorber 4,3 millions de chômeurs ? Les chiffres officiels du chômage ne prennent en compte que la première catégorie des huit catégories de chômeurs de l'ANPE, pour des raisons de comparaisons internationales BIT .

Si 1% de croissance a créé 43000 emplois ( 777 000/ 18% cumulés en dix ans ), il faut donc 100 % de croissance cumulée ( Soit 20%/an sur un mandat politique de 5 ans ! ) pour absorber 4,3 millions de chômeurs ! Nous nous souvenons des discours politiques des années 1990 qui disaient qu'en deçà de 3% , la croissance ne mordait pas sur le chômage ( Raymond Barre) . Et nous comprenons bien qu'à croissance zéro, si une entreprise embauche par croissance de son chiffre d'affaire, c'est une autre entreprise concurrente qui débauche par décroissance de son chiffre d'affaire.

Le deuxième peuple de France exclu de l'emploi et de la reconnaissance qui lui est lié, ne se fait d'ailleurs pas d'illusion sur le discours politique. Culpabilisé par une armée d'inséreurs professionnels ( pas dupes non plus), il fait semblant de chercher ( à quel coût humain !) un emploi introuvable et que la souffrance vécue par ceux qui en ont, rend de moins en moins enviable !

L'enjeu du deuxième peuple de France consiste alors à transformer son temps libre subi ( ce qui nécessite un travail sur soi conséquent) en temps libre choisi, pour survivre et donner sens à sa vie à l'écart des regards des héros de la croissance ;

Christian Dejour dans son livre « la souffrance en France » décrit avec quelle facilité Hitler a su jouer de cette logique du bouc émissaire dans une Allemagne avec six millions de chômeurs en focalisant la responsabilité du chômage sur les juifs. Dans d'autres contextes historiques de manque d'emplois car non partagé, les « indésirables » étaient encouragés à s'expatrier vers les Amériques, les missions humanitaires pour les jeunes peuvent jouer le même rôle !

Laissons là les trouvailles, que le Politique ne manquera pas de trouver, en renvoyant dos à dos les travailleurs et les sans emplois pour justifier la situation actuelle très semblable à la crise de 1929. Mais constatons que dans notre société duale, deux imaginaires sociaux différents se construisent parce que leurs temps sociaux du quotidien n'ont plus le même contenu, ni le même sens. Imaginons comment ces deux imaginaires au lieu de s'opposer pourraient se compléter dans un scénario différent de celui du Titanic, celui plus enviable d'une métamorphose ?


Une autre régulation de la violence : la crise écologique au secours de la crise sociale ?

Face aux enjeux d'une crise sociale et écologique sans précédent à l'échelle de notre histoire ( fin des énergies non renouvelables, réchauffement climatique, et chute de la biodiversité ), des initiatives citoyennes multiples n'ont pas tardé à se manifester dans la diversité des réalités locales. Ses composantes les plus actives se trouvent au sein du deuxième peuple de France, les premiers à avoir compris qu'aucune solution ne pouvait être trouvée dans la croissance exclusive du marché, qui depuis les années 1975 n'évolue plus dans le même sens que l'évolution du bien être social. Si la croissance économique est un préalable au progrès, arrivé à un certain niveau, elle a des rendements décroissants en terme de bien être ! Des 1995, plus de 400 économistes américains ont éclaté en deux catégories le PIB des USA : celles porteuses de qualité de vie nommées Genuine Progress Indicator ou IPR, Indicateur du Progrès Réel et les autres qui ont un effet négatif sur cette qualité (pollutions de l'eau, des sols, de l'air, chômage, déplacements, délinquence, maladies liées à la croissance, destruction des forêts etc). Pour l'année 1998, le montant consacré au bien être aux USA IPR : 1 770 milliards de dollars, ne constituent que le tiers du montant consacré à la consommation globale PIB : 5 153 milliards de dollars ! En Europe les mesures du PNUD (Programme des nations unis pour le développement) montrent les mêmes écarts entre le PIB et l'indicateur du développement humain IDH.

Tout converge vers l'idée qu'une reconception du contenu de la croissance ( quoi produire ? pour qui ? avec qui ? et comment ?) peut être favorable au bien être en même temps qu'elle devient nécessaire face aux enjeux de la crise écologique dont les premiers effets sont déjà là.

Une révolution culturelle en perspective tant dans nos comportements et gestes du quotidien dans notre manière de vivre et de consommer que dans une évolution de nos systèmes productifs ! Sur les comportements du quotidien, le deuxième peuple de France (par sa faible empreinte écologique) est en avance et culturellement mieux préparé que le premier peuple de France qui privilégie une économie de l'avoir sur une économie de l'être ! Certains revendiquent le titre d' « objecteurs de croissance », d'autre se réclament d'une sobriété volontaire qui peut être aussi joyeuse..

Mais pour passer d'un système productif linéaire qui extrait, transforme, et jette : 99% de nos marchandises ont six semaines de vie, 80% n'ont qu'un seul usage, 1/3 des matériaux sont recyclés (Futuribles 2005) en système productif circulaire sur le cycle de vie des produits qui « réduit, réutilise, recycle, récupère, reconditionne, répare, réemploit, relocalise », il faut aussi des savoirs et l'intelligence des entreprises existantes avec l'appui de nombreux talents des associations de la société civile dont les salaires pourraient être aidés par l'Etat en toute logique de relance keynésienne comme en 1936 ! Les bilans énergie, CO2, toxicité, matière, diversité, bien être qui accompagnent une telle nouvelle économie n'ont rien à voir avec un retour à la bougie !

Cette autre régulation de la violence qui intégrerait l'effort conjugué des deux peuples de France pourrait prendre l'allure d'un grand chantier où la monnaie (invention des hommes) serait remise à sa juste place d'outil au service du bien commun. La métamorphose vers ce nouveau contrat social cette fois explicite, serait alors celle du passage d'une société de marché (qui concentre la richesse en quelques mains) à une société « avec » marché riche de créativité et de lien social !

Mais préférons-nous le scénario du Titanic où seuls les premières classes arrogantes, rentières du capital, se prémuniront dans une société d'Hyper contrôle digne du roman d'Orwell, des effets des catastrophes sociales, écologiques et monétaires à venir ? Dans le nouveau rapport au temps (instantané) et à l'espace où nous entraîne la révolution technologique, est-il bien raisonnable de revenir, comme au Moyen âge, à des forteresses (ou citadelles) de paix et de richesse dans des océans d'insécurité et de misères ?

Francois Plassard (mail sur demande).

Chômeur qui comme de nombreux autres chercheurs de sens de ce deuxième peuple de France, porte un projet de création de hameaux de maisons bioclimatiques en partenariat avec des maires ruraux. Une des nombreuses application de l'économie circulaire riche de créativité sociale ! Auteur du livre : « Crise écologique ou crise sociale ? vivre ensemble autrement » Editeur : www.leseditionsovadia.com.



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